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Les données publiées sur l’exploitation sexuelle et la traite sont alarmantes et ne reflètent qu’une partie de la réalité. En effet, le nombre total de victimes d’exploitation sexuelle est sous-estimé du fait des difficultés de signalement, du manque de formations des professionnel·le·s pour détecter les cas et de la méconnaissance du phénomène en général. En 2022, ECPAT-Belgique, en partenariat avec DEI-Belgique, a publié une étude qui souligne qu’en Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), très peu de données sont disponibles quant au phénomène d’exploitation sexuelle des mineur·e·s.
Cette étude, commanditée par deux cabinets ministériels de la FWB, a recueilli les témoignages de plus d’une cinquantaine d’acteurs·trices de terrain issu·e·s des secteurs de la justice, de la police, et des milieux associatif et institutionnel qui expliquent que le phénomène d’exploitation sexuelle en FWB est en augmentation. Ils et elles racontent :
"[Les filles] commencent de plus en plus jeunes, on est aux alentours de 13, 14 ans. La plus jeune qu’on a eu, elle est entrée en prostitution à 12 ans" - Association accueil de mineur·e·s
"Selon notre équipe gare du Midi, il y en a au moins 7 sur 10 qui vivent de l’exploitation sur leur parcours (exploitation sexuelle étant la principale), dans les MENA qu’on rencontre" - Association accueil de mineur·e·s
Cette approche holistique a permis de mettre en évidence les lacunes quant à la détection et la prise en charge des victimes d’exploitation sexuelle en FWB, notamment :
"On n’est jamais assez outillés. La formation continue est essentielle, ainsi qu’une bonne connaissance des acteurs clés. Après on a surtout un manque de moyens et d’effectifs, on est débordé·e·s, on a très souvent des cas urgents à gérer" - Service institutionnel
À la suite de ces constats, nous avons émis et portés des recommandations avec ECPAT-Belgique et plusieurs organisations dont Esperanto, la fondation Samilia et Child Focus, devant les cabinets concernés pour demander leur mise en œuvre.
La lutte contre l’exploitation sexuelle et la traite des enfants doit être une priorité absolue à tous les niveaux de pouvoir. Les cabinets ont une responsabilité vis-à-vis de ces constats, de la mise en œuvre des recommandations et, plus largement, de la protection des enfants. Cette responsabilité est d’ailleurs soulignée par la Commission parlementaire traite du Parlement Fédéral, dont les recommandations ont été remises en juin 2023.
J’entends une voiture qui s’arrête très brusquement. Trois personnes en sortent et me balancent à l’intérieur comme un animal. A partir de là, je ne savais pas où j’étais, ce qui se passait. Après avoir été violée, maltraitée et battue, on m’a dit que je devais me prostituer. – Témoignages de mineures victimes d’exploitation sexuelle recueillis par ECPAT France
Nous appelons les autorités compétentes à mettre en œuvre les éléments suivants :
Un·e enfant est victime d’exploitation sexuelle lorsqu’il·elle est contraint·e de se livrer à une activité sexuelle en échange d’une contrepartie, telle qu’un gain ou un bénéfice, ou la promesse d’un gain ou d’un bénéfice, de nature pécuniaire ou sous la forme d’un avantage perçu par une tierce personne, l’agresseur·e ou l’enfant lui-même.
L’enfant peut être contraint·e par la force physique ou les menaces. Certain·e·s enfants se trouvent dans des situations qui les rendent plus vulnérables, comme la pauvreté, les abus, la négligence, ou encore le fait d’être non accompagné·e ou de vivre dans la rue.
L’exploitation sexuelle peut également avoir lieu en ligne, ce qui est de plus en plus courant en raison de l’évolution rapide des technologies de l’information et de la communication.
Non. Bien que les mineur·e·s étranger·ère·s non-accompagné·e·s (MENA) soient particulièrement vulnérables en raison d’une précarité exacerbée, chaque enfant peut être victime d’exploitation sexuelle, surtout s’il·elle se trouve en situation de vulnérabilité. L’utilisation de plus en plus fréquente d’Internet rend également tou·te·s les enfants plus exposé·e·s au risque d’exploitation sexuelle.
L’exploitation sexuelle n’induit pas nécessairement des faits liés à la traite des êtres humains. La traite des êtres humains est caractérisée par trois éléments constitutifs : une action, un but et un moyen.
La différence entre les deux phénomènes repose donc dans le fait que la traite des êtres humains peut avoir plusieurs finalités dont l’exploitation sexuelle, tout comme l’exploitation sexuelle peut avoir lieu dans un contexte qui n’est pas celui de la traite des êtres humains. [1] >> Consultez à ce sujet le Guide de Terminologie pour la Protection des Enfants contre l’Exploitation et l’Abus Sexuels, 2016
Il s’agit d’une procédure de protection spécifiquement dédiée aux victimes de la traite des êtres humains et/ou de certaines formes aggravées de trafic des êtres humains. Elle organise l’orientation des victimes au niveau national belge, en apportant une assistance à ces dernières et en renforçant les possibilités de lutter contre les auteurs·trices de traite ou de trafic des êtres humains.
Pour accéder à cette procédure, trois conditions cumulatives doivent être remplies (Circulaire du 23 décembre 2016) :
L’exploitation sexuelle est différente de la traite des êtres humains (voir question ci-dessus). Une victime d’exploitation sexuelle n’est donc pas nécessairement victime de traite des êtres humains. Il est donc difficile pour les victimes d'exploitation sexuelle de répondre aux critères nécessaires pour obtenir le statut de « victime de la traite des êtres humains ». Il est donc indispensable d’adopter une procédure afin que chaque victime soit protégée.