Actualités / Événement / Une exposition photo pour dénoncer la détention militaire d’enfants palestiniens
Des soldats israéliens ont arrêté Fawzi J., 16 ans, à Hébron le 7 décembre 2017, dans le cadre d'une répression de grande ampleur contre les manifestants après que le président américain Trump ait reconnu Jérusalem comme capitale d'Israël. Entre son arrestation et son interrogatoire, il a été passé à tabac et agressé verbalement à plusieurs reprises. (PHOTO : FLASH 90 / WISAM HASHLAMOUN)
Chaque année, Israël arrête et poursuit environ 700 enfants palestiniens devant des tribunaux militaires, dans la majorité des cas après les avoir accusés d’avoir jeté une pierre sur un soldat israélien[1]. Trois quart d’entre eux subissent des violences physiques suite à leur arrestation[2]. Du 17 au 23 novembre 2022, l’exposition « L'intolérable : les enfants en détention militaire » se tient en français et en néerlandais à la Chambre des représentants de Belgique pour dénoncer cette réalité et interpeller les parlementaires belges.
Plus de 1,3 millions d’enfants palestiniens vivent sous l’occupation israélienne en Cisjordanie. Chaque année, 700 d’entre eux sont arrêtés près d’un checkpoint, proche du mur de séparation, lors de manifestations, ou chez eux, au milieu de la nuit, comme en témoigne par exemple Ruwad, 16 ans : « c’était l’aube, je dormais à la maison. Soudainement, quelqu’un a enlevé ma couverture. J’étais en état de choc. Ils m’ont dit de me taire et de partir avec eux. »[3] Ils sont alors transférés vers un lieu d’interrogatoire, bien souvent ligotés et les yeux bandés.[4] Les interrogatoires peuvent durer plusieurs heures durant lesquelles les militaires israéliens utilisent généralement des violences physiques (dans 73% des cas[5]) et psychologiques dans le but d’obtenir des « aveux » de la part d’enfants qui ne sont, dans plus de 90% des cas, ni accompagnés d’un avocat ni de leurs parents.[6]
Les enfants arrêtés sont souvent placés en détention provisoire avant d’être jugés par un tribunal militaire[7] qui présente un taux de condamnation de 99%[8] et n’écarte que très rarement les aveux obtenus par la force ou la torture. Pendant leur incarcération, qui peut durer plusieurs mois voire années[9], les enfants n’ont accès à aucun soutien psychologique et n’ont pas d’accès adéquat à l’éducation, celle dispensée en prison ne suivant pas le cursus de l’école palestinienne.
Obaida Jawabra, ancien enfant prisonnier et sujet du court métrage « OBAIDA »[10], a été arrêté trois fois et abattu par les forces israéliennes le 17 mai 2021, alors âgé de 17 ans. (DCI Palestine/ MATTHEW CASSEL)
A 14 ans, Obaida est arrêté pour la première fois par les forces israéliennes et, ligoté, yeux bandés, on lui fait subir une fouille à nu. « Les soldats me frappaient à des endroits où les coups ne laisseraient pas de marque sur mon corps pour qu’il n’y ait pas de preuve que je puisse utiliser pour témoigner contre eux » expliquait-il alors. Obaida a été arrêté à de multiples reprises et abattu par les forces israéliennes à 17 ans, le 17 mai 2021. Un court métrage a été réalisé à son sujet par DCI Palestine.[11]
Depuis 2000, plus de 10.000 enfants ont été arrêtés et emprisonnés par l’armée israélienne.[12] Il ne s’agit donc pas de cas ponctuels mais de violations graves et systématiques des droits des enfants palestiniens dénoncées par plusieurs organisations internationales et par les Nations Unies.[13] La Belgique se dit très engagée pour la défense des droits des enfants dans les conflits armés.[14] En exposant dans le lieu stratégique qu’est la Chambre des représentants, en portant la parole et les visages de ces enfants aux yeux des parlementaires, DEI Belgique les appelle à jouer leur rôle : dénoncer la responsabilité d’Israël et lui demander de cesser immédiatement ces pratiques.
L’association DCI Palestine travaille depuis 1991 pour les droits des enfants palestiniens en défendant leurs droits et en dénonçant les arrestations arbitraires dont ils sont victimes. Depuis octobre 2021, Israël les a arbitrairement[15] désignés comme organisation liée au terrorisme, et leur travail se voit depuis lors gravement entravé. Ces accusations ont été maintes fois récusées et démontrées sans fondement.
L’exposition « L'intolérable : les enfants en détention militaire » a été réalisée par Defense for Children International (DCI) Palestine, avec le soutien de Défense des Enfants International (DEI) Belgique et en collaboration avec Broederlijk Delen. Elle est soutenue par le député fédéral Simon Moutquin (Ecolo).
16 photos et infographies sont exposées à la chambre des représentants (13, rue de Louvain, 1000 Bruxelles) du 17 au 24 novembre inclus. L’entrée est gratuite et ouverte à tous mais une réservation est nécessaire auprès de Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
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>> Plus d'informations sur la campagne "No way to treat a child"
Certaines organisations ont demandé à la présidente de la Chambre le retrait de l’exposition… Ce qui équivaudrait à demander de bâillonner la parole libre sur les droits de l’enfant, censurer le discours sur les droits humains : une demande insupportable dans un État démocratique.
>> Lire notre communiqué de presse à ce sujet
Note : l’utilisation du genre masculin a été adoptée pour faciliter la lecture mais n’a aucune intention discriminatoire
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[1] 235 des 287 affaires répertoriées par les avocat·e·s de Defense for Children International (DCI) Palestine entre 2012 et 2015 comportaient au moins un chef d’accusation pour cette infraction. Source : DCI Palestine, NO WAY TO TREAT A CHILD – Palestinian children in the Israeli military detention system, Avril 2016 ou, en français : DEI Belgique, Les droits fondamentaux des enfants palestiniens arrêtés, poursuivis et condamnés par l'armée israélienne, 2019
[2] Ibidem
[3] DCI Palestine, témoignage de Ruwad (7 mins) : Palestinian child spends 28 days in solitary confinement
[4] Ligotés dans 95% des cas et les yeux bandés dans 86% des cas d’après les témoignages de 739 enfants recueillis entre 2013 et 2018 par DCI Palestine. Sources : DCI Palestine et DEI Belgique, mentionnées en note n°1.
[5] Ibidem
[6] Ibidem
[7] Depuis 1967, les enfants palestiniens de Cisjordanie tombent sous le coup de la loi militaire israélienne et sont alors automatiquement arrêtés et poursuivis par des cours militaires et non par des cours civiles. Sources : DCI Palestine et DEI Belgique, mentionnées en note n°1.
[8] Statistique issue de : United States Department of State, ISRAEL 2014 HUMAN RIGHTS REPORT
[9] Environ la moitié des enfants concernés reçoivent une peine d’emprisonnement de 3 à 12 mois et selon les circonstances, les peines peuvent être plus longues, de 1 à 3 ans. Sources DCI Palestine et DEI Belgique, mentionnées en note n°1
[10] Pour voir le court-métrage
[11] Ibidem
[12] Sources : DCI Palestine et DEI Belgique, mentionnées en note n°1
[13] Le Comité des droits de l’Homme et le Comité des droits de l’enfant ont condamné ces violations dans leurs observations de 2014 et 2013. En 2013, UNICEF publiait un rapport sur la détention d’enfants par l’armée israélienne, sur base de 400 cas recensés de 2009 à 2013. En mars 2018, B’tselem publiait un rapport sur ces violations des droits des enfants.
[14] La Belgique réaffirme son engagement à promouvoir la protection des droits de l’enfant dans les conflits, 12 février 2022, Royaume de Belgique